On pourrait croire que pour comprendre le monde, l’histoire, la politique, toutes les grandes choses qui régissent notre quotidien, il suffit d’en avoir une vision d’ensemble, comme on nous apprend à l’école – puis au gymnase, et à l’Université. C’est faux. Pour comprendre les intrications des processus, en saisir la teneur sous-jacente, comprendre qui a fait quoi quand et pourquoi, les causes des actions qui déclenchent les évènements, la guerre en Ukraine, etc. – eh bien il faut prendre le temps de penser. Or, comment la pensée s’élabore-t-elle ?
Nullement autrement qu’en allant dans les détails. La philosophie, les mathématiques, les sciences sociales, toutes fonctionnent au fond de la même manière : en sondant les phénomènes. C’est en partant du plus petit (ou du plus grand) pour retourner, de manière récursive, à l’inverse que l’on commence à saisir ce qui, finalement, régit tous les phénomènes, toutes les forces de vie, toutes les actions humaines : ce qui s’ouvre, se découvre, se déplie, déploie, éclot de la façon la plus complète qui soit avant de décroître, rapetisser, pour en fin de compte ne ressembler qu’à un petit tas de rien du tout. Tout, au fond, connaît ce même processus d’éclosion à partir des profondeurs : tout naît à la lumière pour vivre, aspirer de l’air, grandir, se déployer – puis vivre, intensément, si possible de la manière la plus relâchée possible, la plus forte possible, comme un cheval qui se cabre et s’envole au galop -, avant de ralentir, revenir au trot, puis au pas, pour finalement aller de plus en plus lentement… et mourir.
Dans tout ce que nous vivons et traversons au cours de notre vie, tous les mouvements et écarts que nous vivons, toutes les souffrances que nous endurons et devons surpasser, mais également dans toutes les joies et moments heureux qui viennent à nous, ce sont toujours les mêmes forces qui nous travaillent. Allons dans les détails pour en découvrir toute la teneur, la composition, la structure et voyons comment celles-ci nous portent, pour aller ici ou là, au gré et selon les fluctuations de nos humeurs… de notre envie… et de notre raison. Soyons fermes et tendres avec ces forces, pour ne pas les broyer, mais entretenons-les avec soin comme nous prendrions soin d’un enfant en train de grandir. Nourrissons-les intelligemment, avec des lectures, des rencontres, des fêtes et des voyages, des nettoyages réguliers ; n’oublions pas d’en changer parfois les logiciels, pour ne pas nous répéter ; agissons avec délicatesse au moment de les déployer lorsque nous en avons besoin – que cela soit pour réussir dans nos entreprises, faire acte de présence ou imposer notre volonté, ou encore nous défendre.
Bref : agissons avec sagacité, en êtres sensibles et raisonnables que nous sommes. Et n’oublions pas d’aller dans les détails, car c’est là que se cachent les secrets les plus merveilleux de l’existence.