Manque de culture

Vous le ressentez aussi, vous ? Le manque de culture !

Alors qu’avant la crise, nous pouvions sortir, aller où bon nous semblait (ou presque) – théâtre, cinéma, casino, sans parler de voir des gens -, d’un jour au lendemain, tout s’est arrêté. Notre quotidien n’a plus été le même. Etonnant de voir à quel point nous nous sommes soumis – soi-disant pour notre bien – au nouvel ordre. Etonnant et inquiétant, aussi ; alors que certains plastronnent que nous avons ainsi sauvé des milliers de vies, ce sont des centaines de milliers d’autres, voire des millions (rien qu’en Suisse) que l’on a subitement arrêtées.

Arrêt dans l’élan de nos vies qui nous portait à sortir, donc, mais pas seulement ; également à prendre des nouvelles de nos relations (acte qui, espérons-le, n’a pas cessé mais s’est bien plutôt renforcé avec la crise), spontanément à aller voir dehors si nous y étions, à flâner dans les rues, nous arrêter devant notre marchand de légumes préféré, à voir si le dernier livre de notre auteur préféré était sorti… Tout ça, du jour au lendemain, coupé.
Nous avons coupé dans nos chairs. Dans nos âmes. Dans nos vies.

Je ne sais pas vous, mais moi, le manque de relations humaines en « vrai », où l’on peut toucher l’autre, le prendre dans nos bras, lui faire une accolade, l’embrasser – eh bien, tout ça, ça me pèse. Ce manque, cette absence.
Sans parler de la musique, que nous n’écoutons plus qu’en ligne. Sauf peut-être pour les citadins, qui ont eu la chance d’avoir, pour certains, des concerts à leurs fenêtres.

Espérons que la culture repartira de plus belle dans quelques temps ! Que nous pourrons revivre les mille et un chatoiements de la vie en vrai, en live, dans nos chairs et nos âmes. Et ne pas nous contenter de nos écrans qui, s’ils représentent d’excellents substituts ou supports de culture momentanés, ne peuvent jamais remplir la même fonction qu’une rencontre, un verre échangé sur une terrasse, un baiser ou encore… le fait de prendre un enfant par la main.

A bien y regarder, d’un point de vue critique, il est tout à fait inquiétant que les choses se soient passées ainsi. N’avons-nous pas été déshumanisés ? Désacculturés ? Désaccordés de nous-mêmes, un moment ? Bien sûr, le confinement a certainement fait du bien à certaines personnes sous stress, aura permis peut-être de se recentrer, de prendre du recul sur nos vies, bien souvent confinées elles aussi dans une débauche d’énergie permanente, de nous offrir un bol d’air frais… Mais il aura révélé que nous ne sommes pas tous égaux devant la crise, fait souffrir quantité de gens, dans l’impossibilité de faire leur deuil dans des conditions dignes, de revoir leurs proches – personnes âgées, mais pas seulement – et, dans tous les cas, mis les nerfs à rude épreuve.

Espérons-le de tout coeur : la vie doit reprendre son cours, gentiment mais sûrement !