Moi, Tonya (USA/2017)

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avec Margot Robbie, Sebastian Stan, Allison Janney, etc.

Je m’appelle Tonya Harding. Quand j’étais petite, ma mère m’a poussé à m’entraîner comme une folle pour que je devienne un jour une championne. Ce que j’ai fait : je suis devenue championne de patinage artistique. Devant Nancy Kerrigan – et toutes les autres.

Je les ai battues, les salopes ! Elles voulaient me faire la peau, que je sois la méchante Tonya, moi qui ai réussi le triple axel en premier ! Les salauds de juges eux aussi, ils voulaient ma peau. Ils ne me laissaient aucune chance : quand je réussissais bien, ils me donnaient 5.1, 5.2, maximum ; alors que les autres, elles recevaient des 5.8, 5.9, etc. C’était injuste – et ça l’est toujours.

J’ai donné mon maximum : j’ai tout fait pour devenir championne olympique. Mais à Albertville, en 1992, j’ai fini 4e du concours, à cause d’une lame remise de travers ; et à Lillhemmer, deux ans plus tard, 8e, à cause d’un lacet cassé. Injuste, vraiment. Ce qui s’est passé avec Nancy Kerrigan cette année-là relève d’autre chose que du sport. C’est Jeff et ses copains qui ont mis leur plan à exécution. Ils voulaient me venger des menaces de mort que l’entourage de Nancy avait proférées contre moi. Mais c’est Shawn, en fait, qui avait tout exécuté.

Je n’ai pas eu de chance, je vous dis. Depuis toute petite, ma mère m’a soûlé pour que je devienne championne olympique. Moi, bien sûr, je voulais faire du patinage. Mais ma mère m’a poussée comme une folle, jusqu’à claquer tout son argent dans mes cours de patin. Diane m’a prise sous son aile, comme une protégée, jusqu’à ce que j’aie 20 ans. Ensuite, je l’ai renvoyée, parce que ça ne se faisait pas de foutre des notes si mauvaises à la première patineuse de l’histoire qui réussissait le triple ! Diane était gentille, mais elle n’avait pas les couilles pour m’amener au plus haut niveau. Alors j’ai choisi Dody, qui m’a aidé à devenir encore meilleure.

Mais ça n’a pas vraiment marché avec Dody non plus. En fait, j’avais une vie privée pourrie, à cause de mon mari, Jeff. Il se conduisait mal avec moi, me battais, me frappais ; tout en voulant me protéger. Ca a pourri mon patinage – et ma vie. J’ai été mal entourée depuis le début, mal conseillée aussi, et ça a fait de moi qui je suis devenue. J’ai lutté pour garder la tête haute, ne pas répondre aux provocations, aussi celles de ma mère, mais je n’ai pas pu éviter le scandale. Aux Etats-Unis, les gens aiment ceux qui ont du succès, mais ils détestent les loosers. Et moi, je suis devenue une looser, avec l’affaire Nancy Kerrigan et Jeff, qui a tout foutu en l’air.

J’aurais pu être championne olympique, devant Nancy. Bordel, j’étais pas loin d’y arriver ! Mais il a fallu qu’un putain de lacet me lâche juste avant la compétition. Et Diane (j’avais rechangé d’entraîneur entre-temps) n’y était pour rien. C’est juste moi qui n’ai pas eu de chance…

Dans le sport de compétition et au plus haut niveau, les coups ne sont pas rares. Coups du sort, bien sûr, mais aussi coups de matraque. Le patinage artistique symbolise peut-être mieux que nul autre sport les déceptions, les joies et les peines des athlètes. A condition de réussir à garder son calme, sa concentration, son jeu, tout est possible ; mais dès qu’un grain de sable s’en mêle, enraie la machine, l’ensemble est brisé…