Protéger les jeunes artistes et sportifs d’élite dans leur développement

La route qui mène aux sommets d’une carrière professionnelle est souvent sinueuse et parsemée d’obstacles. Pour les jeunes talents, en art et en sport, cette vérité est d’autant plus vraie qu’en Suisse, ces deux domaines font l’objet de très peu d’attention de la part des médias, sponsors et autres partenaires professionnels. Quantité d’initiatives, de concours, compétitions et autres possibilités d’évolution – sans parler des cadres sportifs et instituts de formation – existent pour préparer les aspirants artistes et sportifs à une future carrière. Mais globalement, à y regarder de plus près, tous les projets visant les jeunes artistes et sportifs font l’impasse sur la dimension d’inspiration propre à guider les jeunes talents vers les sommets.

1. L’inspiration, la dimension manquante dans les programmes d’encadrement des jeunes artistes et sportifs d’élite en Suisse

Etre inspiré, littéralement être animé d’un souffle qui nous pousse à créer, à oeuvrer à une production, par enthousiasme – sous l’impulsion des forces de vie qui nous traversent -, tel est précisément l’état dans lequel des jeunes artistes et sportifs doivent nécessairement se trouver pour poursuivre leurs desseins. Sans cela, en effet, comment faire des résultats ? Progresser ? Avoir même la motivation et l’énergie nécessaires pour aller à l’école et continuer en parallèle son art ou son sport ?

Notre parcours personnel en sport (athlétisme) nous a donné l’occasion de voir, à plusieurs reprises, que si certaines personnes bien intentionnées accordent volontiers de l’attention à cette dimension, il arrive encore trop souvent qu’elle se trouve écartée ou oubliée. Passent avant la logique de recherche de résultats, de productivité (parfois dès un très jeune âge), de volonté de dépasser les autres, etc. Avec tout l’égoïsme que cela suppose.

2. Pourquoi se préoccuper de l’inspiration en regard de ce qui touche aux jeunes artistes et sportifs d’élite ?

La pierre de touche de tout développement fructueux dans les domaines artistiques et sportifs, à l’adolescence, est la capacité à demeurer en bonne santé tout en poursuivant des objectifs élevés. Que cela soit en art ou en sport, tout jeune qui se destine à faire carrière plus tard doit obligatoirement être en bonne santé pour performer tout en maintenant un haut degré de motivation pour demeurer concentré sur son objectif. Là aussi, il arrive encore régulièrement que bon nombre de jeunes talents se blessent, passent à côté de leurs objectifs, voire décrochent complètement de leur activité favorite par oubli de ces deux composantes essentielles.

Le fait d’être inspiré, donc animé par un modèle dans son art ou son sport favori, de chercher à « faire comme », d’avoir en tête des représentations de champions et professionnels ayant du succès, doit aider les jeunes talents à progresser. En Suisse, il est parfois encore difficile d’affirmer vouloir devenir comédien, artiste de cirque ou sportif professionnel. Pourtant, ce sont là des professions comme les autres qui demandent un investissement personnel largement supérieur à la plupart des autres métiers.

La reconnaissance pour ceux qui se lancent dans cette voie est loin d’être garantie.

3. Par quoi passe une vraie forme de reconnaissance ?

Pour le grand public, voir des Federer, Ammann, Spirig & autres Regula Mühlemann triompher sur les scènes mondiales dans leur discipline respective entraîne du respect et certainement de l’admiration. De là à dire que la reconnaissance est elle aussi facilement accordée à nos sportifs et artistes helvétiques, il y a encore un pas. La mentalité et la culture dans notre pays tendent encore souvent à freiner les ambitions créatrices et les volontés de se professionnaliser dans les domaines des arts vivants et du sport. Il existe cependant déjà, comme indiqué plus haut, bon nombre d’excellentes structures pré- ou professionnelles pour les artistes (musique, théâtre, cirque) et en sport (notamment dans les sports de neige).

Mais il reste encore ardu de voir une vraie reconnaissance émerger déjà pour les jeunes talents qui s’investissent corps et âme dans leurs disciplines respectives. Les sponsors sont par exemple très difficiles à trouver pour un jeune artiste ou un jeune sportif évoluant à un niveau continental. Des propositions de contrats n’arrivent que très rarement sur la table ; le financement privé est indispensable à la poursuite d’une carrière dans l’immense majorité des cas. La Suisse fonctionne à une très large échelle avec un système « au mérite » qui valorise les résultats, mais prend peu en compte la personnalité des jeunes talents.

Le fait de reconnaître à quel point un jeune est inspiré dans le cadre de son art ou de son sport et développe des initiatives créatives pour donner corps à ses ambitions pourrait commencer de changer la donne. Il est grand temps que les médias, sponsors, institutions artistiques et sportives – notamment celles régissant le sport d’élite -, mais également les acteurs privés (fondations, entreprises, mécènes, etc.) trouvent un vrai intérêt à soutenir un jeune/des jeunes. Il est tout aussi important d’avoir une vue d’ensemble sur les besoins propres au secteur et de concevoir le développement des jeunes artistes et sportifs dans une perspective globale.