Bumble, Tinder & co : miroirs aux alouettes ?

Les applications de rencontre rencontrent un succès phénoménal : pour faire la connaissance de quelqu’un, aujourd’hui, elles sont devenues quasiment indispensables. Comment est-ce possible – et quel impact cela a-t-il sur nos relations ?

En 2023, si vous êtes célibataire et cherchez à rencontrer un-e partenaire, vous serez forcément confronté-e à la délicate question de l’inscription sur un site – ou une application – de rencontre. Vous devrez vous créer un profil, le remplir avec des photos, des informations sur votre personne, votre physique, votre âge, votre activité professionnelle, etc. ; le tout étant répété par des milliers, voire millions de gens à travers la planète sur les mêmes sites – ou applications – de rencontre. Avec au final une base énorme de données pour chaque application, qui permet de « swiper » presque indéfiniment à la recherche du – ou de la – bon-ne partenaire.

Pour qui s’est déjà essayé à l’exercice, il aura vite été clair que l’exercice se révèle extrêmement laborieux. Contrairement et à la différence de rencontres en-dehors des sites de rencontre – dans la « vraie » vie -, il y a très peu de chances que vous obteniez suffisamment de « likes » pour ensuite « matcher » avec des partenaires intéressants. La difficulté s’inscrit dans le fait que le peu d’informations que nous publions et dont nous disposons ne suffit pas à se faire une idée de la personne que nous avons en face. Que faire ? Eh bien, juger d’après la seule apparence. Apparence qui a toutes les chances d’être plus que trompeuse.

Toute la difficulté est là : vouloir faire des rencontres sur la base d’une photo, de quelques mots ou lignes, de deux-trois informations sur de parfaits inconnus. Mais dans quelle galère nous lançons-nous là ? Pourquoi est-il devenu si difficile – apparemment – de faire des rencontres à l’ancienne, dans la « vraie » vie, en soirée ou chez des amis ? Que s’est-il passé pour qu’en une dizaine d’années, nos vies amoureuses – nos relations – soient devenues si compliquées que nous nous en remettions à des applications censées nous assurer la découverte de la perle rare ?

Il semblerait qu’il soit devenu plus facile pour quantité de gens peu en confiance avec eux-mêmes ou les autres (voire les deux) de passer par une prise de contact virtuelle avant d’envisager une rencontre dans la vie réelle. Il y a aussi le fait que nous sommes devenus de plus en plus exigeants avec nous-mêmes et nos partenaires, rétrécissant parfois tellement le champ des possibles que nous ne désirons plus que faire la rencontre de la « bonne » personne, tout de suite, immédiatement : signe de notre impatience chronique, qui a tendance à croître. Nous avons également une furieuse tendance à nous enfermer dans une idée toute faite de la personne que nous voulons rencontrer, comme s’il fallait absolument que celle-ci détienne telle quantité d’argent, ait réalisé telles études, soit comme ceci ou comme cela pour nous plaire.

Mais où avons-nous laissé notre fantaisie ? Notre imagination ? Sommes-nous tellement conditionnés que nous ne pouvons envisager d’avoir des relations avec des personnes totalement différentes de nous, venues de tout à fait ailleurs, avec un parcours complètement différent, peut-être des enfants, des projets ou rêves fous… ou pas du tout ? Que faut-il faire pour que nous nous décrispions totalement et (re)lâchons la pression que nous nous infligeons en permanence ? Alors que notre vie sentimentale/relationnelle devrait être la porte ouverte sur le rêve, l’enfance, la joie (de vivre), bref : la psuchè, nous en faisons toujours davantage l’objet de nos étranges désirs, incommensurables, irréalisables, terribles par maints côtés, qui portent bien souvent à la confusion et à la frustration quant à ce que nous voulons vraiment.

Franchement, du calme ! Avec plaisir, légèreté, sensibilité, évoluons au plus près de nos instincts (vitaux), primordiaux pour ne pas nous perdre, et agissons avec sagesse et détermination, de manière à ne blesser personne…